lundi 14 avril 2014

Une histoire consistante de Griffiths

Face au soleil deja ardent, je sens mon visage envahi d'une douce chaleur. Toutefois, une legere brise parcourt les nuques de celles et ceux, assis comme moi sur ce banc metallique et froid. Chacun de nous percoit grace a ses sens une realite diverse. Peut-on d'ailleurs parler de realite?
Le monde n'existe que parce que les humains en ont une conscience plus ou moins aigue. Et ceci est valable a Melbourne ou au pied du mond Sharp, sur Mars a travers les optiques de Curiosity, oeil domotique ultrasensible a travers lequel plusieurs centaines de personnes, dans un laboratoire aux Etats-Unis, a Toulouse ou Paris ne percoivent toujours pas une verite unique.





 "Les histoires consistantes de Griffiths ont ete introduites en 1984 pour relier les mesures quantiques dans des narrations vraisemblables. Une histoire de Griffiths est construite a partir d'une suite de mesures plus ou moins quelconques ayant lieu a des instants differents. Chaque mesure exprime le fait qu'une certaine quantite physique, eventuellement differente d'une mesure a l'autre, est comprise, a un instant donne, dans un certain domaine de valeurs. Par exemple, au temps t1, un electron a une certaine vitesse, determinee avec une approximation dependant du mode de mesure; au temps t2, il est situe dans un certain domaine de l'espace; au temps t3, il a une certaine valeur de spin. A partird'un sous-ensemble de mesures, on peut definir une histoire, logiquement consistante, dont on ne peut cependant pas dire qu'elle soit vraie; elle peut simplement etre soutenue sans contradiction. Parmi les histoires du monde possibles dans un cadre experimental donne, certaines peuvent etre reecrites sous la forme normalisee de Griffiths; elles sont alors appeles histoires consistantes de Griffiths, et tout se passe comme si le monde etait compose d'objets separes, dotes de proprietes intrinseques et stables. Cependant, le nombre d'histoires consistantes de Griffiths pouvant etre reecrites a partir d'une serie de mesures est en general sensiblement superieur a un. Tu as une conscience de ton moi; cette conscience te permet de poser une hypothese: l'histoire que tu es en a meme de reconstituer a partir de tes propres souvenirs est une histoire consistante, justifiable dans le principe d'une narration univoque. En tant qu'individu isole, perseverant dans l'existence un certain laps de temps, soumis a une ontologie d'objets et de proprietes, tu n'as aucun doute sur ce point: on doit necessairement pouvoir t'associer une histoire consitante de Griffiths. Cette hypothese a priori, tu la fais pour le domaine de la vie reelle; tu ne la fais pas pour le domaine du reve."

Les particules elementaires - Michel Houellebecq.

1 commentaire:

Hari a dit…

Je me demande si mon approche de la physique, comme de la psychanalyse, ne tourne pas autour de ce concept d'histoires consistantes ?
Ce serait amusant de creuser un peu.
http://www.entropologie.fr